Publié le 28 novembre 2022

Dans ces temps de crise, une approche prospective en matière de politique budgétaire devient indispensable

Le 15 novembre 2022, l’Assemblée plénière de la Chambre des salariés (CSL), présidée par Madame Nora Back, a adopté à l’unanimité son avis concernant le budget de l’État 2023.

À peine remis du ralentissement économique causé par la pandémie du Covid-19, les économies luxembourgeoise, européenne et mondiale sont à nouveau confrontées à une période d’instabilité et d’incertitudes économiques provoquée par la guerre en Ukraine et la hausse des prix qui en résulte.

Dans ce contexte économique très incertain, la CSL souligne la nécessité d’adopter une politique budgétaire contracyclique qui devrait reposer sur deux piliers importants : le soutien des ménages par une hausse des dépenses sociales et de compensation pour renforcer leur pouvoir d’achat, ainsi qu’une hausse généralisée de l’investissement.

La CSL salue la nature expansive du projet de budget pour laquelle une dégradation (temporaire) des finances publiques doit être prise en compte. Or, cette détérioration reste complètement raisonnable et doit être comprise comme un prix à payer pour garantir une stabilité économique et sociale au sein du Grand-Duché.

Par ailleurs, la CSL estime que l’ampleur de la dégradation budgétaire projetée pour les quatre derniers mois de 2022 sera moindre que prévue, améliorant ainsi aussi la situation pour 2023. Ce constat est confirmé par les projections budgétaires de la Commission européenne, qui sont plus optimistes que les projections du Ministère des Finances.

La situation des finances publiques apparaît donc mieux qu’annoncée et permet d’adopter une politique budgétaire contracyclique indispensable pour éviter une récession persistante et se substituer à une partie de la demande privée qui se replie dans cette période d’incertitude économique. Cette politique budgétaire doit soutenir les ménages par une hausse des dépenses sociales et de compensation pour renforcer leur pouvoir d’achat.

Dans ce contexte, la CSL regrette que les inégalités sociales et la pauvreté ne soient pas parmi les priorités de ce projet de budget dans lequel aucune mesure concrète n’est prévue pour contrer ces problèmes sociaux. Pourtant, les inégalités et la pauvreté sont en constante progression et elles sont alimentées davantage par une inflation qui touche les pauvres d’une manière plus forte que les riches. Combinée à la hausse continue des taux d’intérêt sur les emprunts des ménages, l’inflation représente un risque aigu pour les ménages qui voient leur pouvoir d’achat s’effondrer.

De ce fait, la CSL répète ses revendications pour une action résolue contre la pauvreté et les inégalités. La CSL revendique, entre autres, une revalorisation complète des prestations familiales, un soutien renforcé aux familles monoparentales pour tenir compte de leur risque de pauvreté exceptionnellement élevé, et une revalorisation conséquente et structurelle du niveau du salaire minimum pour tenir compte de la hausse continue de la pauvreté laborieuse.

En matière de politique fiscale, le projet de budget est une déception aux yeux de la CSL car il manque d’ambition et les mesures ne sont pas à la hauteur des défis, malgré certaines modifications ponctuelles qui sont à saluer, comme la baisse de la TVA.

La CSL revendique une adaptation complète et immédiate du barème d’imposition à l’inflation pour contrecarrer l’effet de la progression à froid : la hausse nominale des revenus suite à l’indexation résulte en une augmentation du taux d’imposition (marginal et moyen) des ménages, effectivement diminuant leur pouvoir d’achat. Une telle adaptation ne peut pas être comprise comme un coût pour l’État, mais plutôt comme une restitution de l’impôt trop perçu par l’État.

En plus de la revalorisation du barème d’imposition à l’inflation, la CSL propose une réorganisation plus vaste du barème pour soulager les petits et moyens revenus aux dépens des plus hauts revenus. Cette revendication permettrait de réduire la progressivité du barème pour les petits et moyens revenus et de l’étendre aux plus hauts revenus. En contrepartie, la CSL revendique la fin, respectivement l’abaissement des privilèges fiscaux octroyés aux revenus de capitaux qui ne sont pas accordés aux revenus du travail, une restriction plus importante des avantages fiscaux accordés aux multipropriétaires-bailleurs à travers des déductions fiscales, ainsi qu’une réforme profonde du traitement fiscal plus avantageux des plus-values et des bénéfices de spéculation. Ces mesures fiscales pourraient renforcer le pouvoir d’achat des ménages, limitant ainsi le ralentissement économique et augmentant par-là les recettes de l’État.