Comment mettre en place un compte épargne-temps ?

Uniquement via convention collective ou accord interprofessionnel

La mise en place du compte épargne-temps peut uniquement se faire dans le cadre d’une négociation collective, soit par la voie d’une convention collective de travail, soit par le biais d’un accord interprofessionnel au niveau national ou sectoriel.

En ce qui concerne les accords interprofessionnels au niveau national ou sectoriel, ceux-ci doivent fixer un cadre général permettant aux entreprises non couvertes par une convention collective de travail propre à l’entreprise d’instaurer un tel système qui doit cependant émaner d’un commun accord entre l’employeur individuel et sa délégation du personnel.

Homologation ministérielle des accords d’entreprise

Afin de vérifier que les accords au niveau de l’entreprise respectent le cadre général fixé dans l’accord interprofessionnel au niveau national ou sectoriel, ils doivent être notifiés au ministre ayant le Travail dans ses attributions en vue d’une homologation, après avoir pris l’avis des parties signataires de l’accord interprofessionnel cadre.

Cette homologation est nécessaire, étant donné que le Fonds pour l’emploi sera, le cas échéant, appelé à intervenir.

Quand a-t-il été introduit dans le Code du travail ?

Une loi du 12 avril 2019 a introduit un compte épargne-temps (CET) pour les salariés ayant un contrat de travail régi par le Code du travail.

Cette loi fait suite au programme gouvernemental de 2013 qui avait annoncé que « l’introduction du compte épargne-temps permettra une meilleure flexibilité dans la gestion du temps de travail tant pour les entreprises que pour les salariés notamment en ce qui concerne la formation continue et la conciliation entre travail et famille ».

Il s’agit plutôt d’une loi-cadre offrant aux partenaires sociaux une possibilité de négociation, puisque la mise en place d’un compte épargne-temps ne pourra se faire que via la négociation d’une convention collective ou par le biais d’un accord interprofessionnel.

Pour pouvoir en bénéficier, le salarié devra avoir au moins deux ans d’ancienneté au sein de son entreprise. Le CET pourra compter un maximum de 1 800 heures.

Documentation

Comment est alimenté le compte épargne-temps ?

Pour pouvoir alimenter son compte, le salarié doit avoir une ancienneté de 2 ans dans l’entreprise et faire une demande écrite.

Aucun salarié ne peut être obligé d’alimenter le compte épargne-temps contre sa volonté.

Le compte épargne-temps individuel est tenu en heures.

Les heures suivantes peuvent être mises sur un CET :

  • les jours de congé supplémentaires accordés en vertu d’un plan d’organisation du travail en fonction de la durée de la période de référence ;
  • les soldes excédentaires de la période de référence ou de l’horaire mobile ;
  • les heures supplémentaires prestées à la demande de l’employeur ou avec son autorisation. Une heure supplémentaire travaillée est compensée par une heure et demi ;
  • le repos compensatoire en cas de travail de dimanche ;
  • les jours de congé compensatoire des jours fériés tombant un dimanche ;
  • les jours de congé supplémentaires au-delà des 26 jours légaux dans la mesure où ils n’ont pas encore été pris dans l’année en cours ;
  • un maximum de 5 jours de congé payé de recréation n’ayant pu être pris au cours de l’année de calendrier pour des raisons de maladie du salarié, pour des raisons de congé de maternité ou de congé parental en vue de pouvoir en profiter au-delà du 31 mars de l’année qui suit et qui, à défaut, serait perdu.

Le maximum du solde horaire du compte épargne-temps est fixé à 1 800 heures, soit 45 semaines à 40 heures ou à peu près un an de jours de travail.

Comment utiliser le compte épargne-temps ?

Demande similaire au congé

Le salarié fait une demande écrite. L’employeur ne peut la refuser que si les besoins de service et les désirs justifiés d’autres salariés de l’entreprise ne s’y opposent.

Sauf dérogation conclue entre partenaires sociaux, le congé doit être fixé au moins un mois à l’avance.

À temps plein ou à temps partiel

Pour que les possibilités de recours au compte épargne-temps soient plus flexibles, la loi prévoit que le compte épargne-temps peut être utilisé par du congé rémunéré à temps plein ou à temps partiel. Ainsi, le salarié pourra en profiter pour ne pas travailler du tout pendant une certaine période, mais aussi pour ne prendre que quelques journées ou demi-journées par semaine.

Dans le cadre de cette utilisation à temps partiel, le salarié doit prester un minimum de 10 heures restantes en moyenne par semaine. Il s’agit d’éviter des durées de travail hebdomadaires tellement courtes qu’elles seraient susceptibles de rendre l’organisation du travail dans l’entreprise difficile, voire impossible.

Maladie, congé extraordinaire en cas d’utilisation

En cas de maladie du salarié pendant l’utilisation de ses droits accumulés sur le compte épargne-temps, les jours de maladie lui seront rajoutés sur son compte sur présentation d’un certificat médical endéans un délai de 3 jours, si le salarié est au pays. S’il séjourne à l’étranger, il aura l’obligation d’informer l’employeur aussi rapidement que possible.

Il en est de même si au cours de l’utilisation de ses droits accumulés sur le CET, il se produit un événement donnant droit au congé extraordinaire (décès d’un proche, déménagement, mariage, etc.).

Comment est assurée la protection du salarié ?

Le temps d’utilisation du congé issu d’un compte épargne-temps est considéré comme temps de travail. La période d’utilisation génèrera ainsi également du congé annuel de recréation et sera comptabilisée sur l’ancienneté de service pour la détermination des droits à un régime de pension complémentaire.

Le salarié est considéré en congé payé et l’employeur est tenu de lui conserver son emploi ou un emploi similaire correspondant à ses qualifications et assorti d’un salaire au moins équivalent.

Comment est liquidé le compte épargne-temps ?

La liquidation du compte épargne-temps se fera par le paiement d’une indemnité compensatoire dans les hypothèses suivantes :

  • le licenciement du salarié par l’employeur ;
  • la démission du salarié ;
  • la résiliation d’un commun accord du contrat de travail ;
  • la cessation des affaires par suite de décès, d’incapacité physique ou de déclaration en état de faillite de l’employeur ;
  • le jour de l’attribution au salarié d’une pension de vieillesse et au plus tard à l’âge de 65 ans, à condition qu’il ait droit à une pension de vieillesse ;
  • le jour de l’attribution au salarié d’une pension d’invalidité ;
  • le jour de l’épuisement des droits à l’indemnité pécuniaire de maladie ;
  • le jour de la notification de la décision de reclassement externe ;
  • le jour du retrait de la reconnaissance de la qualité de salarié handicapé à la personne handicapée ;
  • le jour de la confirmation de la décision de réorientation vers le marché de travail ordinaire notifiée au salarié handicapé ;
  • en cas de décès du salarié, auquel cas l’indemnité compensatoire sera versée aux ayants droits.

L’indemnité compensatoire correspond à la conversion monétaire de l’ensemble des droits que le salarié a acquis, multipliés par le taux horaire en vigueur au moment du paiement.

Quelles sont les obligations de l’employeur ?

L’employeur doit mettre en place un système assurant la tenue exacte et détaillée du compte épargne-temps. Il doit assurer que la consultation individuelle par le salarié soit à tout moment garantie et que le salarié puisse sur base d’un relevé mensuel vérifier que l’approvisionnement correspond à ses désirs initiaux.

L’employeur doit également provisionner au passif et à l’actif du bilan la contrepartie financière des comptes épargne-temps de ses salariés, augmentée des charges patronales et l’adapter, le cas échéant, à l’évolution du coût de la vie.

Quelles sont les garanties en cas de faillite de l’employeur ?

La mise en place d’un système de garanties répond surtout à la nécessité d’assurer la protection des droits du salarié en cas de faillite ou de liquidation de l’entreprise.

Les dispositions légales visent à éviter que le temps mis en compte ou les sommes provisionnées en contrepartie des heures accumulées sur les compte épargne-temps, représentant des créances de salaires, ne tombent dans la masse de la faillite et ne soient ainsi perdus pour les salariés.

Création d’un super-privilège

Ainsi, la loi prévoit une modification de l’article 2101 du Code civil.

Les créances résultant de la liquidation du compte épargne-temps sont incluses dans les privilèges prévus par cet article. Ensuite, il est précisé qu’en cas de faillite ou de mise en liquidation de l’entreprise, les créances résultant de la liquidation du compte épargne-temps font également partie du super-privilège.

Contrairement  aux créances de salaires, aucun plafond n’est prévu. Les créances résultant de la liquidation du compte épargne-temps sont avancées dans la hiérarchie des super-privilèges en les plaçant devant les créances de salaires, de traitements et d’indemnités se rapportant aux 6 derniers mois de travail et les créances du salarié portant sur des indemnités de toute nature résultant de la rupture du contrat de travail ou du contrat d’apprentissage.

Il s’agit en fait d’un super-super-privilège.

Garantie du Fonds pour l’emploi

En outre, une modification de l’article L. 126-1 du Code du travail prévoit que les créances résultant d’un CET seront dorénavant garanties par le Fonds pour l’emploi jusqu’à concurrence d’un plafond égal au double du salaire social minimum de référence, en cas de faillite, d’ouverture d’une procédure d’insolvabilité de l’employeur ou de constatation de fermeture définitive d’entreprise ou d’établissement de l’employeur.

Ainsi les salariés ayant alimenté leur compte épargne-temps et dont l’employeur fait l’objet d’une procédure de faillite ou d’une liquidation peuvent récupérer un montant maximal égal au double du salaire social minimum de référence même si l’absence total d’actif ne permet pas de faire jouer le superprivilège prévu par le nouveau paragraphe 2 de l’article 2101 du Code civil.

Quid des conventions collectives de travail en vigueur ?

Une disposition transitoire précise que les règles mises en place par une convention collective avant l’entrée en vigueur de la loi restent d’application aussi longtemps que la convention collective de travail qui les prévoit est valable. Ce n’est qu’à l’occasion de la négociation d’une nouvelle convention que ces dispositions devront être adaptées de manière à être conforme au nouveau texte de loi.

Quelle est la mission des délégations du personnel en matière de compte épargne-temps ?

La mission de la délégation du personnel est élargie en matière d’information et de consultation : celle-ci aura dorénavant également pour mission de s’occuper, le cas échéant, de la surveillance de la mise en place et de l’exploitation correcte du compte épargne-temps.

Quelle est l’incidence d’un compte épargne-temps sur l’indemnité de chômage ?

Pour le salarié en période d’utilisation des droits acquis résultant d’un compte épargne-temps, le montant de l’indemnité de chômage complet est déterminé sur base du salaire brut effectivement touché au cours des 3 mois ayant précédé la période visée.

Au niveau des revenus accessoires que le chômeur indemnisé a l’obligation de déclarer à l’Agence pour le développement de l’emploi, les droits acquis dans le cadre d’un compte épargne-temps sont cumulables avec l’indemnité de chômage complet.

Quel est le traitement fiscal du compte épargne-temps ?

La contrepartie rémunérée du temps accumulé sur un compte épargne-temps prévue par une disposition légale ou règlementaire, une convention collective ou tout autre contrat collectif de travail est considérée comme revenu d’une occupation salariée.